Une arrivée plutôt pluvieuse

Sully était de garde, cette nuit. Il faisait noir, il pleuvait et il faisait froid. C’était le genre de nuit où tout le monde préférait être dans un bon lit chaud à dormir. Muni d’une lampe de poche et d’un parapluie, Sullivan surveillait non loin de la grille quand il entendit quelqu’un parler. Une jeune femme, ça ne faisait aucun doute. Il s’approcha de l’ouverture. La personne se trouvait de l’autre côté de la grille, accompagnée d’un cheval. Elle était trempée et risquait de prendre froid. L’homme aurait bien évité de la faire entrer, mais par une pluie pareille, mieux valait finir ici que de tomber gravement malade. Il lui ouvrit la porte et s’écarta pour la laisser entrer, lui tendant son parapluie pour qu’elle s’y abrite.

« J’aurais préféré ne pas vous faire entrer ici… Enfin, maintenant que la grille est ouverte, c’est à vous de voir. Je peux vous conduire à l’intérieur de l’orphelinat si vous voulez, vous pourrez vous y réchauffer. » dit Sullivan, cherchant, parfois, un peu ses mots.

Il se débrouillait de mieux en mieux avec le français, mais son accent anglophone restait encore très prononcé. Son regard se porta sur l’animal. Devait-il le laisser entrer ici? Il pourrait distraire les orphelines, mais il pourrait aussi apporter des ennuis à Sully.

« Que faites-vous dans la région? Vous êtes loin de la ville, ici. Vous vous êtes perdue? »

Tora avait l’air quelque peu paniquée… Avait-elle peur de quelque chose? Son regard ne semblait pas du tout être le regard de quelqu’un qui est rassuré. Sullivan s’en voulait de lui ouvrir la grille et de l’inviter à entrer. Il espérait que la jeune femme ne lui en voudrait pas lorsqu’elle découvrirait qu’elle ne pourrait plus partir d’ici et que les employés malmenaient les orphelines.

Sullivan haussa les épaules. Personne ne lui en voudrait de faire entrer une jeune femme ici. Il regrettait surtout de lui ouvrir la grille.

« Non, non, je n’aurai pas d’ennuis pour vous avoir ouvert la grille, ce n’est pas cela le problème. »

Comment le lui expliquer sans la paniquer? Tora avait l’air sympathique et à première vue, elle était très gentille et polie. C’était ce genre de moment qu’il détestait. La dernière fois qu’il avait fait entrer quelqu’un, une journaliste du nom de Kyhara, il ne l’avait jamais revue. Le directeur était tombé sur elle, c’était certain. Il l’avait prévenu, pourtant, de ne pas aller le voir!

« Quand bien même vous voudriez repartir, vous ne pourrez pas, de toute façon. On entre, mais on ne sort pas d’ici. Le directeur empêche quiconque de sortir. Ce n’est pas un endroit très… saint, ici, mais la ville est loin et vous risquez de tomber malade et de vous perdre… Enfin, il fait nuit et il ne semble pas y avoir bien des gens qui surveillent… Avec un peu de chance, on ne remarquera pas votre présence et je pourrais vous faire sortir. Pour votre cheval, faites-le entrer, on lui trouvera une cachette. »

Il lui expliquerait la situation de l’orphelinat une fois qu’il l’aurait emmenée à l’intérieur. Tora n’aurait qu’à aller avertir les gens de la ville des atrocités qui se passaient ici et tout serait réglé. De toute façon, elle avait besoin de s’arrêter.

« I’m Sullivan. Enchanté, Tora. »

Tora… quel drôle de nom! Il avait du mal à le prononcer avec son accent. Ça faisait sonner bizarrement le prénom de la jeune femme, mais c’était le mieux qu’il pouvait faire. L’homme attendit que Tora fasse entrer son cheval avant de refermer la grille le plus doucement possible, pour éviter de faire le moindre bruit.

« Dans les arbres, là-bas, sur le bord de la grille… Il n’y a jamais personne. Votre cheval y sera bien cacher. Ensuite… ensuite, euhm… enfin, je ne sais pas. Vous voulez aller dans un endroit précis? Cuisine, douches, salon… »

Il lui proposa même sa chambre, si elle voulait se changer, puisque ses vêtements étaient trempés. Se serait bête qu’elle tombe malade et puis la chambre de Sullivan était sans danger : personne n’y entrerait.

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« Parce qu’il y a de quoi être horrifier à entrer ici. Je vous expliquerai quand nous serons in the orphelinat. » dit-il, mélangeant l’anglais au français de temps en temps, incapable de se souvenir de certains mots en français. Ça ne lui venait pas toujours à l’esprit.

Tora serait à moitié en sécurité avec lui, effectivement. Il ne laisserait pas quiconque poser ses mains sur elle, mais il ne pouvait rien promettre non plus. Il s’était fait passer une fois sur la table de torture, il pourrait très bien y passer à nouveau par un homme plus costaud que lui.
Il jeta un coup d’œil au cheval. Personne ne viendrait le voir ici. Puis, il entraîna Tora en direction de l’orphelinat, prenant garde à ce que son parapluie les protège tous les deux de l’eau. La jeune femme était presque collée à lui, mais il ne semblait pas s’en apercevoir. Il guettait les bruits et les mouvements autour de lui. Si personne ne voyait Tora, elle aurait peut-être une chance de partir d’ici.

« Je comprends, mais je peux vous en passer, si vous voulez. Se sera probablement beaucoup trop grand pour vous, mais se sera mieux que rien. Et puis vos vêtements auront le temps de sécher d’ici demain. Vous pourrez manger et vous reposer un peu. Je me débrouillerai pour que vous puissiez repartir. »

Un cri déchira le presque silence de la nuit. Sullivan se figea un moment. Ça venait d’une chambre dont la fenêtre était ouverte. L’homme secoua la tête. Il ne pouvait rien faire pour cette pauvre orpheline probablement en train de se faire violer brutalement.

« C’est ce genre de chose que j’aimerais vous éviter en vous permettant de partir. Je ne peux rien vous garantir, par contre. Il se passe d’horribles choses, ici. Autant de tortures que de viols, malheureusement. Les orphelines sont coincées ici depuis que la vieille femme qui avait l’orphelinat en charge est morte. Elle a légué l’établissement à l’un de ses neveux, mais je ne sais pas ce qu’il est advenu de celui-ci. Néanmoins, depuis, c’est l’Enfer ici. Si j’arrive à vous faire sortir d’ici, j’aimerais que vous ailliez avertir les autorités dans la ville la plus proche. » lui dit-il avant d’ouvrir la porte de l’orphelinat.

Il la laissa entrer avant lui, éteignit sa lampe de poche, secoua son parapluie et entra à son tour. Il attendit de savoir où elle voulait se rendre.

Sullivan eut un faible sourire. Alors elle venait de quitter un homme qui l’avait battu pour tenter de se trouver un orphelinat qui l’accueillerait… Ça expliquait peut-être le fait qu’elle voulait garder ses vêtements trempés. Elle ne semblait pas être partit depuis longtemps, vu son air égaré. Sully se promit de veiller sur elle jusqu’à ce qu’il trouve le bon moment pour la faire sortir d’ici.

« Les employés ne peuvent pas partir non plus. Je pourrais sortir, effectivement, mais je préfère ne pas risquer ma vie non plus. Vous, personne ne vous connaît et personne ne sait que vous êtes ici. Pour moi, ce n’est pas le cas.
Si vous voulez mon avis, la femme de cet homme ignorait ce qui se passe ici quand elle vous a dit de venir. Personne ne sait ce qui arrive aux orphelines, à moins d’être ici. Vous avez des blessures? Ne vous en faites pas, je ne compte pas m’en servir pour vous faire du mal, je veux seulement vous venir en aide. »

Il avait une trousse de premiers soins dans sa chambre. Il pourrait s’en servir si Tora acceptait qu’il l’aide. Il ne la forcerait pas à se faire soigner si elle ne le voulait pas, mais Sully s’inquiétait pour elle. Lui-même avait passé un véritable calvaire à cause de Gin et de ses blessures… il savait ce que c’était.

« Moi? No. Il y a un new directeur sans l’orphelinat, mais il est comme l’ancien, sinon pire. Ce type me fiche la trouille, mais il sait comment se faire obéir. Je n’ai jamais rencontré un homme aussi horrible. Il m’a presque tué… non… il m’aurait tué si on n’avait pas trouvé… Cet imbécile s’attaque autant à ses employés qu’aux orphelines.
Enfin, peu importe, pour le moment, personne ne peut rien y changer. Et cessez de m’appeler ‘monsieur’, appelez-moi Sullivan. »

Finalement, comme la jeune femme ne semblait pas se décider, Sully lui fit signe de le suivre. Qu’elle le veuille ou non, il l’emmènerait à sa chambre. Elle y aurait la paix.

[Il y a un topic dans les chambres du personnel pour celle de Sully… tu peux poster là directeur si tu veux, sinon, poste ici et je ferai le prochain dans la chambre, c’est comme tu veux]

--> Chambre de Sullivan